En 2021, Emmanuel Macron a annoncé un investissement de 2 milliards d’euros pour booster la filière hydrogène en France,voyant-là une solution miracle pour la transition énergétique. La guerre en Ukraine a renforcé cet engouement, coupant l’Europe du gaz russe et poussant les dirigeants à chercher des alternatives décarbonées.

Comme l’explique Le Point, la France a ainsi lancé un « plan hydrogène » doté de 9 milliards d’euros dans le cadre de France 2030, visant à multiplier les projets allant des électrolyseurs aux flottes de bus à hydrogène.

Mais l’Académie des sciences, sous la présidence d’Alain Fischer, a récemment publié un rapport critique, dirigé par Marc Fontecave, professeur au Collège de France. Ce rapport met en lumière les défis énormes de la production d’hydrogène vert, notamment la quantité colossale d’électricité requise. Chaque million de tonnes d’hydrogène vert produit par électrolyse nécessite environ 55 TWh d’électricité, soit l’équivalent de cinq réacteurs nucléaires de type EPR. Pour atteindre ses objectifs, l’Europe devrait produire 1 700 TWh d’électricité bas carbone supplémentaires, représentant plus de 60 % de toute l’électricité qu’elle consomme actuellement.

La France, avec ses ambitions de produire 1 million de tonnes d’hydrogène vert d’ici 2035, aurait besoin de la production de cinq réacteurs EPR pour verdir sa consommation actuelle, et de vingt réacteurs supplémentaires pour atteindre une production de 4 millions de tonnes. Le rapport souligne également que la capacité installée d’électrolyseurs en France n’était que de 0,03 GW fin 2023, très loin des objectifs de 6,5 GW pour 2030 et 10 GW pour 2035…

En plus des contraintes énergétiques, les coûts de production de l’hydrogène vert restent très élevés par rapport à l’hydrogène gris (produit avec du gaz) freinant ainsi les investissements. Le prix du kilogramme d’hydrogène vert est en moyenne quatre fois plus élevé que celui de l’hydrogène gris.

Face à ces défis, l’Académie des sciences appelle à une révision des objectifs et à une priorisation des efforts. Elle recommande de concentrer les ressources sur la décarbonation de l’hydrogène gris et sur les usages industriels essentiels comme l’acier, le ciment et certains transports lourds. Elle insiste également sur l’importance d’augmenter rapidement les capacités de production électrique décarbonée et de renforcer la recherche.

Et Marc Fontecave de conclure que « les objectifs non réalisables ne seront pas réalisés, et cela conduira le citoyen à considérer que les gens à la tête des affaires sont soit des incompétents, soit des menteurs ». Ce qui, en matière d’écologie, arrive décidément souvent…